Basilique Saint-Sauveur et crypte Saint-Amadour
ROCAMADOUR (LOT, Occitanie)

Rocamadour est un sanctuaire marial parmi les plus importants du moyen âge, fréquenté par les pèlerins au moins depuis la seconde moitié du XI^e siècle. Sa notoriété est essentiellement due à sa Vierge noire en majesté, dont les miracles attirent des fidèles originaires de toute l’Europe.

Fréquemment retrouvées dans des arbres ou des buissons, au fond d’un lac ou d’une rivière, près d’une source ou d’une fontaine, ou encore enterrées, les Vierges noires sont marquées par les cultes voués à l’Eau et à la Terre. Ces croyances ancestrales, solidement ancrées dans l’inconscient collectif, sont imprégnées du culte des déesses mères préhistoriques, dont les caractéristiques se sont transmises aux déesses orientales, celtiques et antiques.

Ces divinités attachées aux mondes souterrain, aquatique ou végétal, rappellent le lien essentiel entre la vie et la mort. Déesses de la Fécondité et de la Terre, liées à la nature, guerrières redoutées, elles sont protectrices et guérisseuses, intercèdent lors de la mort, règnent sur les intempéries, président aux accouchements et maîtrisent les éléments Eau et Feu. Dans la religion chrétienne, la Vierge Marie a hérité des pouvoirs de toutes ces divinités presque délaissées, perpétuant ainsi discrètement le culte des déesses mères, à défaut de le faire disparaître.

Les Vierges noires sont omnipotentes pour certaines, détentrices d’un seul pouvoir thaumaturgique pour d’autres. Elles seraient également capables d’assurer la liberté aux prisonniers injustement condamnés ou détenus dans les geôles mahométanes.

Notre-Dame de Rocamadour figure une Vierge noire toute puissante. Elle est censée garantir la fécondité des femmes, protéger les enfants, obtenir la guérison des malades et préserver des naufrages et de la noyade. Egalement guerrière, elle aurait permit aux rois de Castille, Alphonse VIII, et d’Aragon, Pierre II, qui avaient fait peindre son effigie sur les étendards de leur armée, de remporter la victoire de 1212 sur les musulmans lors de la bataille de Las Navas de Tolosa. Cette victoire amorçant la Reconquista valut à Notre-Dame-de-Rocamadour d’être très honorée en Espagne, ce qui perdure aujourd’hui.

La légende raconte que la statue de la Vierge Noire fut sculptée par l’évangéliste Luc, puis apportée en Occident par Zachée. Ce dernier devint en terre occitane saint Amadour, patron de la région. Sa tombe fait encore aujourd’hui l’objet d’un pèlerinage fervent. Cette association des deux cultes est une tradition purement locale et assez tardive (1663), qui vise à éviter une rivalité intestine nuisible à la renommée du sanctuaire. La Vierge noire de Rocamadour est la seule de ce type que l’on peut trouver en Quercy.

Le pèlerinage de Rocamadour atteignit son apogée au XIIIe siècle. Par la suite, la guerre de Cent Ans, les guerres de religion, la Révolution et leurs cortèges de destructions se chargèrent d’épuiser le pèlerinage et de ruiner le site. Au XIXe siècle, le clergé entreprit une vaste campagne de restauration, dirigée à partir de 1858 par l’abbé Chevalt, qui acheva de modifier les édifices médiévaux. C’est toutefois grâce à ces travaux que nous pouvons aujourd’hui encore admirer le sanctuaire de Rocamadour, accroché à la falaise, entre ciel et terre, entre humain et divin.